J’ai évoqué dans mon dernier billet des éléments tirés du rapport
d’activité 2009 de l’Agence Nationale de l’Évaluation et de la qualité des
Établissements Sociaux et Médico-sociaux (ANESM), et notamment mon sentiment
d’un rapport bien plus riche que l’année précédente.
Le retour sur le programme de
recommandations de bonnes pratiques professionnelles
Le rapport commence par les recommandations de bonnes pratiques
professionnelles, une des missions de l’ANESM. Sont rappelés les 7 programmes
de ces recommandations (1. Les fondamentaux, 2. L’expression et la
participation des usagers, 3. Les points de vigilance et la prévention des
risques, 4. Le soutien aux professionnels, 5. Les relations avec
l’environnement, 6. Les relations avec la famille et les proches, 7. La qualité
de vie) et les 15 recommandations élaborées dans ce cadre, de 2008 à 2009. Même
si la qualité des recommandations peut être relative (certaines structurées et
pertinentes, d’autres à mon avis plus « légères » ou
« euphémistiques »), la production reste notable. Un tableau
récapitulatif complémentaire présente les sites enquêtés (259), les personnes
interviewées (215) le nombre de réunions (48), les personnes ressources (110),
les participants aux groupes de travail (283), chiffres importants mais à
relativiser en les rapportant au nombre de recommandations. Est ensuite mis en
avant le programme 2010 :
> Programme 1 (fondamentaux) : l’éthique et
le cadre déontologique,
> Programme 2 (expression et participation des
usagers) : le partage de l’information dans le secteur de la Protection
judiciaire de la jeunesse et de l’Aide sociale à l’enfance,
> Programme 4 (soutien des professionnels) :
l’évaluation en EHPAD, l’intégration scolaire et la scolarisation des enfants
handicapés en SESSAD, l’évaluation interne dans les services à domicile, la
socialisation et la scolarisation des enfants et adolescents autistes,
> Programme 7 : la qualité de vie en EHPAD.
A noter : il y aura ainsi, fin 2010, deux recommandations pour les
EHPAD (après l’enquête bientraitance réalisée en 2009 pour ces structures),
ceci étant en phase avec l’insistance des pouvoirs publics sur la progression
de l’exigence les concernant. Il y aura aussi, fin 2010, deux recommandations
sur l’accompagnement des personnes autistes, là aussi en lien avec le
volontarisme des pouvoirs publics (Plan Autisme).
La question de la diffusion /
appropriation des recommandations dans le secteur
Une deuxième partie détaille la diffusion des recommandations élaborées,
à travers des transmissions en format papier (74 600 textes distribués), ou par
Internet (178 700 visites du site ANESM), ou par la presse (entre 7 et 37
articles par mois sur l’ANESM, pendant l’année 2009), ou dans des journées
interrégionales (10 journées rassemblant près de 4000 participants au total),
ou par la participation à des manifestations. Est également présentée une
partie spécifique de l’enquête 2009 dans les établissements et services sociaux
et médico-sociaux (ESSMS) sur l’évaluation, montrant une importante lecture des
textes sur la bientraitance, sur la maltraitance, sur le projet personnalisé,
sur l’évaluation interne. Est évoqué dans ses grandes lignes enfin le questionnaire
bientraitance dans les EHPAD (voir mon article dans ce blog le 6 avril 2010 :
cliquer ici pour y accéder).
L’avancée de l’évaluation interne
et externe
L’enquête 2009 sur l’évaluation dans les ESSMS est ensuite présentée,
notamment avec le constat d’une progression de l’évaluation (66 % des ESSMS au
lieu de 58 % en 2008 seraient engagés dans la démarche) avec une forte
proportion dans le champ du handicap, et une plus faible proportion pour la
protection de l’enfance (une forte augmentation néanmoins), dans les structures
d’inclusion sociale, dans les structures pour personnes âgées (ces dernières
représentent 45 % des ESSMS), A
noter dans cette présentation, le caractère flou des statistiques sur le
travail évaluatif portant sur les effets (et sur la conformité à des pratiques
standards). Par ailleurs, les réponses étant déclaratives, il serait nécessaire
d’avoir des réalités plus probantes, mais ce sera l’affaire des évaluations
externes, dont il n’est pas sûr que nous puissions tirer nationalement des
statistiques.
Sont aussi détaillés les résultats des 2 premières
campagnes d’habilitation des évaluateurs externes, ayant abouti à une
habilitation de 348 cabinets en novembre 2009 (leur nombre est passé à 438 en
mars 2010). Les chiffres cités sont très intéressants : un gros tiers des
évaluateurs sont des SARL, un autre tiers des travailleurs indépendants ou des
auto-entrepreneurs. A noter : des différences importantes entre les
caractéristiques des candidats et celles des organismes finalement habilités,
avec un tableau fort étonnant,
au point que je me demande s’il n’y a pas une
erreur… En effet on passe d’un CA moyen de 4 167 K€ pour les candidats à un CA
moyen de 204 K€ pour les organismes retenus. Cela me parait d’autant plus
bizarre que pour 204 K€ de CA moyen, on annonce 12,16 ETP (comment rémunérer
12,16 ETP avec un CA de 204 K€ ??). Cela peut s’expliquer peut-être en
partie par l’absence de salarié ou d’activité en 2008 pour un tiers des
organismes. Mais il y a forcément un élément qui cloche ...
Le fonctionnement et les moyens de
l’ANESM
Pas de surprise dans la présentation d’une consolidation du
fonctionnement et des moyens (un budget de 3 millions d’€, en progression de
16,7 %, avec un financement par l’État de 1,5 million d’€ et de 1,32 million d’€
par la CNSA : donc un déficit en 2009). A noter :
> Le rapport fait part de la création de l’Agence
Nationale d’Appui à la Performance des établissements sanitaires et
médico-sociaux (ANAP) et de la collaboration, jusqu’à une convention à venir,
mise en place entre ANESM et ANAP. Attendons de voir dans l’avenir la
complémentarité ou la concurrence des deux structures…
> Le rapport mentionne également une difficulté
dans le processus d’habilitation des évaluateurs externes : une
contradiction avec la directive européenne sur les services dans le marché
intérieur existerait si « les
membres du Conseil d’administration de l’ANESM représentant, au niveau national, les
organismes gérant des établissements sociaux et médico-sociaux », eux-mêmes « directement
ou indirectement concernés par l’habilitation », avaient la
possibilité de se prononcer « sur
des décisions individuelles : inscription sur la liste des organismes
habilités, retraits ou les refus d’habilitation ». Une modification de
la convention constitutive de l’ANESM a donc été nécessaire : c’est maintenant
le directeur qui a compétence pour « l’ensemble des décisions individuelles d’octroi, de refus, de
suspension et de retrait d’habilitation ». Je considère que cette
situation n’est pas normale. Il aurait été nécessaire, selon moi, d’instituer
une commission formelle, d’autant plus que la nouvelle version de la loi du 2
janvier 2002, corrigée le 21 juillet 2009 par la loi HPST, ne précise en aucune
manière une mission donnée à l’ANESM pour ces habilitations (vous pouvez
vérifier en détail dans l’article 22 de la loi repris dans l’article L_312-8 du
CASF !). Nous pourrions à mon avis, en cas de difficulté, être devant une
relative complexité en juridiction administrative (je ne le souhaite évidemment
pas) !
Enfin si vous avez le temps,
consultez les annexes !
Vous trouverez les statistiques des ESSMS (voir mon billet du 9 mai 2010),
la présentation de l’échantillon des 3000 ESSMS interrogés dans l’enquête sur
l’évaluation, les éléments pour la construction du questionnaire bientraitance
dans les EHPAD, et accessoirement la liste des presque 200 articles parus sur
l’ANESM en 2009.
Un rapport utile donc, bon outil pour comprendre les évolutions du
paysage de l’action sociale et médico-sociale vues du côté de l’évaluation.
Daniel GACOIN
Bonjour,
Une fois de plus un article intéressant et pertinent. Pour compléter votre observation. j'ai effectué une veille sur la totalité des organismes habilités de mon secteur (analyse concurrentielle oblige !).
Un gros tiers est constitué d'entités créées par l'opportunité de marché en 2009 : CA de 0 €. Mais ces organismes (pour beaucoup uni personnel ou auto-entrepreneur déclare dans la case "salariés" un réseau de partenaires : on se retrouve donc avec des organismes disposant de 10 à 15 salariés virtuels pour 0 € de CA (cqfd)
Rédigé par : Henri Kromm | 21 mai 2010 à 10:50
Bonjour,
j'avais fait le même constant à la lecture de la 2ème liste des organismes habilités sortie en novembre 2009 sans fouiller plus en avant la question. Mais les noms des nouvelles entités étaient bien là pour éveiller ma curiosité (Machin truc Conseil, Bidule machin Ingénierie, Monsieur Conseil X...). La concurrence jouera sans aucun doute son jeu. Sur une demande de proposition d'évaluation externe (un établissement de 80 places), nous étions en concurrence avec un autre organisme, il proposa près de 10 jours pour la mission... la fiction ne dépassa pas la réalité...
bonne continuation à tous et merci pour la richesse de ce blog
cordialement
Rédigé par : christopha malabat | 26 mai 2010 à 09:39