J’ai déjà évoqué ici le feuilleton des obligations et dates butoirs pour
les évaluations internes et externes. Les questions sont simples : combien
d’évaluations (internes et externes) pendant la période d’autorisation (de 15
ans) de chaque établissement ou service social ou médico-social (ESSMS) ?
Quelle date butoir pour la présentation des premiers rapports d’évaluation ?
Incroyable (mais vrai), plus de huit ans après la loi du 2 janvier 2002, après
tous les ouvrages (voir le livre de base de J.-F. Bauduret et M. Jaeger) et
textes d’application, les choses ne sont pas encore claires… et un nouvel
épisode dans la « clarification »
s’ouvre aujourd’hui !
Le point de départ …
La loi du 2 janvier 2002 affirmait le nouveau cycle de vie pour les
ESSMS (de 15 ans) avec un principe de démarches obligatoires à intervalles
réguliers :
> Un temps d’autorisation de fonctionner de 15 ans (à partir d’un projet d’établissement dans le dossier initial), revu formellement avant une reconduction, toujours par cycle de 15 ans. Un décret a précisé le 10 janvier 2002 que les ESSMS autorisés avant 2002 avaient une période d’autorisation allant jusqu’en janvier 2017.
> Une réécriture du projet d’établissement tous les 5 ans,
> L’obligation de procéder à une évaluation interne une fois par période de 5 ans (soit 3 fois par période d’autorisation de 15 ans),
> L’obligation de faire procéder à une évaluation externe une fois par période de 7 ans (soit 2 fois par période d’autorisation de 15 ans).
> Les dates butoirs des premières évaluations étaient fixées à janvier 2007 (évaluation interne) et janvier 2009 (évaluation externe) pour les établissements autorisés avant 2002 (les 15 ans d’autorisation allant jusqu’à janvier 2017).
… suivi par un feuilleton sur le
calendrier et les dates butoirs de l’évaluation
Février 2006 : Une circulaire DGAS indique que les
délais légaux des premières évaluations (2007 et 2009 pour les ESSMS autorisés
avant 2002, avec une période d’autorisation expirant en janvier 2017) ne seront
pas imposés. Est évoqué un décret à venir avant la fin de l’année 2006 avec de
nouvelles dates butoirs.
Septembre 2006 : Des échanges informels entre représentants de
fédérations et DGAS font apparaître l’idée d’un report de 2 ans (janvier
2009 pour la 1ère
évaluation interne et janvier 2011 pour la 1ère évaluation externe)
de ces dates butoirs ans pour les ESSMS autorisés avant 2002.
Avril 2007 : Un projet de décret et des échanges oraux avec
la DGAS font apparaître, en réalité, un report de 2 ans (janvier
2009) pour la 1ère
évaluation interne, et de 1 an (janvier 2010) pour la 1ère évaluation externe.
15 mai 2007 : Le décret sur l’évaluation externe indique que
l’évaluation externe doit se réaliser au plus tard 2 ans après une évaluation
interne.
Octobre 2008 : Le
projet de loi HPST prévoit (article 28) pour les évaluations de chaque ESSMS
pendant les 15 années d’autorisation
que « les établissements et
services mentionnés à l’article L. 312-1 sont tenus de procéder à 2 évaluations
internes et 2 évaluations externes entre la date de l’autorisation et le
renouvellement de celle-ci ».
Elle met donc en avant un allégement (non plus 3 mais 2 évaluations internes)
bien rassurant. Était ajouté que les ESSMS en place avant janvier 2002 auraient
uniquement l’obligation d’1 évaluation interne et d’1 évaluation externe avant
la date de renouvellement de leur autorisation (dates butoirs : janvier
2015, janvier 2017 en tenant compte des 2 ans, au maximum, entre les deux).
Était précisé que les ESSMS créés et autorisés entre 2002 et la date de
publication de la loi HPST verraient leur régime d’autorisation (15 ans, 2
évaluations internes, 2 évaluations externes) démarrer le 1er
janvier 2009.
21 juillet 2009 : La loi HPST finale (article 124) affirme et
complique à nouveau le circuit :
1. L’obligation, pour chaque ESSMS, de procéder à des évaluations internes régulières sur un rythme à prévoir par décret (est ainsi avancée une suppression de l’allègement prévu dans le projet initial).
2. L’obligation, pour chaque ESSMS, de faire procéder pendant les 15 années d’autorisation à 2 évaluations externes (également un calendrier prévu par décret).
3. Les ESSMS en place avant le 22 juillet 2009 procèdent uniquement à une évaluation externe au plus tard 2 ans avant la date de renouvellement de leur autorisation (1er janvier 2017 pour les ESSMS créés avant 2002, 2 ans avant la fin de leur période d’autorisation pour ceux ayant eu un arrêté d’autorisation entre 2002 et 2009).
4. Un décret prévu pour la prise en compte dans l’évaluation externe des certifications (pour les ESSMS liés à l’article L.115-28 du code de la consommation).
… avant le dernier épisode
Un projet de décret a été présenté par la toute nouvelle direction
générale de la cohésion sociale (DGCS) aux organisations professionnelles le 1er
février 2010 et est examiné aujourd’hui même par le Comité National de
l'Organisation Sanitaire et Sociale (CNOSS). Ce projet de décret indique :
1. Le retour de l’obligation, pour chaque ESSMS, de procéder à des évaluations internes, tous les 5 ans, (ou pour les structures ayant conclu un contrat pluriannuel d'objectifs et de moyens CPOM, lors de la révision de ce contrat, qui est généralement de 5 ans) avec transmission du résultat aux autorités de contrôle concernées.
2. L’obligation pour les ESSMS de « retracer » chaque année, dans leur rapport d’activité, la « démarche continue d’évaluation ».
3. L’obligation, pour les ESSMS, autorisés avant le 22 juillet 2009, de produire les résultats d'au moins une évaluation interne au plus tard trois ans avant le renouvellement de leur autorisation (janvier 2014, pour une autorisation allant jusqu’en janvier 2017 pour les ESSMS créés autorisés avant la loi du 2 janvier 2002, 12 ans après leur arrêté d’autorisation pour ceux qui ont été autorisés ensuite) puis dans la nouvelle période d’autorisation, le retour dans le droit commun.
4. Pour les ESSMS autorisés après le 22 juillet 2009 (date de promulgation de la loi HPST), l’obligation de produire l’évaluation interne 5 ans après cette date, puis tous les 5 ans.
5. Les ESMS relevant de la protection judiciaire de la jeunesse autorisés et ouverts avant le 22 juillet 2009, devraient communiquer les résultats d'au moins une évaluation interne dans les cinq ans suivant cette date (soit jusqu'au 22 juillet 2014). Ensuite, ils relèveraient du droit commun (périodicité de cinq ans).
6. L’obligation pour les ESSMS de faire procéder à deux évaluations externes entre la date de leur autorisation et son renouvellement. La première des évaluations externes devrait être effectuée au cours des sept années suivant l'autorisation ou son renouvellement et la seconde, au plus tard deux ans avant la date du renouvellement d'autorisation. Serait maintenu, à titre dérogatoire, le fait que les ESSMS autorisés et ouverts avant le 22 juillet 2009 ne procèdent qu’à une évaluation externe au plus tard deux ans avant le renouvellement de leur autorisation.
Les trois cas de figure avec
intégration des obligations de projets et d’évaluations
Si le projet de décret est promulgué en l’état, voici
ce que pourraient donner les obligations futures à partir de 3 cas de figure.
1er cas de figure : un ESSMS créé et
autorisé après le 22 juillet 2009. Les dates à prendre en compte seraient
celles de l’arrêté initial d’autorisation. Les évaluations internes doivent être réalisées/communiquées aux autorités tous les 5 ans (3 sur une période d'autorisation de 15 ans), les évaluations externes se réalisent avec une première dans les 7 ans qui suivent l'autorisation, et la deuxième au moins deux ans avant la fin de la période de 15 ans.
2ème cas de figure : un ESSMS créé et autorisé avant le 2 janvier 2002. Il retrouve après une phase se terminant en janvier 2017 le régime commun, décrit au-dessus, mais sa première évaluation interne doit se réaliser au plus tard avant le 1er janvier 2014.
3ème cas de figure : un ESSMS créé et autorisé entre
2002 et le 22 juillet 2009, ici avec l’exemple d’une autorisation à partir du 1er
janvier 2007.
Une réalité un peu hallucinante…
Je passe vite sur le rythme des consignes,
contradictions, contradictions des contradictions… Je n’oublie pas que les
autorités publiques veulent introduire plus de rationalité/conformité dans la
conduite des ESSMS. Encore faudrait-il que l’exemple de la cohérence vienne de
ces mêmes autorités !
Je continue à penser que le fait de revenir à une
évaluation interne tous les 5 ans est une erreur. Le projet de loi HPST (2
évaluations internes, 2 évaluations externes sur 15 ans, avec 2 ans maximum
entre une évaluation interne et une évaluation externe) était bien plus
satisfaisant. Je note en outre une obligation supplémentaire (des écrits sur la
démarche d’évaluation dans les rapports d’activités). L’overdose va vite
arriver !
Je souhaiterais surtout que la DGCS soit aussi
attentive à la production régulière des projets d’établissements ou de service qu’à
celle du résultat des évaluations. Pourquoi en effet n’a-t-on pas la même
exigence sur les projets ?
Daniel GACOIN
Bonjour,
Je vous rejoins sur l'ensemble (et vous félicite à l'occasion pour la qualité de votre blog). Avec mon regard de consultant (en l'occurrence également évaluateur externe), je suis assez consterné par la gestion de la procédure d'habilitation qui a précipité l'habilitation de 350 organismes alors que le marché ne s'ouvrira réellement que dans d'ici à 5 ans - je vois mal les ESSMS (hors les SIAD et CCAS) s'engager sur la voie de l'évaluation externe avant, tant qu'elles n'en n'ont pas l'obligation.
Si j'ai bien vu, peut être la moitié des organismes s'est créée sur l'opportunité du marché : ils ne leur restent plus "qu'à" se trouver une autre poire pour la soif - étant sur la place depuis plusieurs années, je sais combien il est difficile de développer un portefeuille d'activités : les atermoiements des autorités sur le sujet du calendrier ont certainement mis en difficulté un grand nombre de ces jeunes structures.
Rédigé par : Henri Kromm | 08 février 2010 à 18:33
Bonsoir,
Alors que je partage avec vous l'introduction de votre article, je reste surpris par votre conclusion et les 3 dernières lignes.
En effet, pour sortir de la "dictature de l'intention" (cf. vos propos précédents), il parait important pour nous, représentant des personnes en situation de handicap, de mettre l'accent sur les résultats tout autant que sur le projet : les résultats de l'évaluation interne ne sont ils pas entre autres des données de sortie du projet initial et des données d'entrée pour le suivant ?
Concernant la périodicité des rapports d'activités et d'évaluation : à partir du moment ou une culture de l'évaluation et de la démarche d'amélioration continue s'installe progressivement (rappel : objectif N°1 pour les bénéficiaires), la périodicité de la production de résultats importe moins.
La consolidation de ces derniers s'appuyant par définition sur une construction annuelle, semestrielle, trimestrielle, ...
Rédigé par : Pascal TREFFOT | 11 février 2010 à 19:34
Bonjour Daniel,
Vous le savez, depuis le temps (!!) je partage totalement vos analyses sur les évaluations ; aujourd'hui plus que jamais au regard du "reality show" qui se déroule actuellement sous nos yeux !! Dites nous tout : va-t-on un jour faire quelque chose de simple dans notre secteur ? Et j'entends par simple, quelque chose d'accessible à tous. Quelque chose qui profite avant tout à ceux que la loi appelle (le vilain mot) les usagers ? Quelque chose de qualité ! Car quoi ? si j'ai tout bien tout lu, - non pas Freud ;))- mais les publications de notre célèbre Agence Nationale, le but de l'évaluation c'est bien de mettre l’accent sur la responsabilité des promoteurs de l’action sociale ou médico-sociale ? C'est bien (entre autre) de s’interroger sur les critères qui définissent la qualité ? Ou va-t-on aujourd'hui ? Dubet, Castel, Bachmann et d'autres n'avaient-ils pas dans les anneés 1995 interpellé les uns et les autres de manière virulente :"A quoi sert le social ?". Aujourd'hui, j'ai le sentiment qu'émerge une volonté de noyer le poisson, à défaut du pécheur (non, non, il n'y a pas de faute d'orthographe, c'est bien un accent aigu que j'ai voulu mettre sur le mot pécheur). Finalement, est-ce que trop de qualité n'entrainera pas dans notre secteur un sentiment de désillusion, d'évanescence, une perte des valeurs qui l'ont fondé, une disparition de la cohérence qui devrait faire sa force ? D'ailleurs dans le sigle DGCS, le C veut bien dire cohésion ? A moins que ça ne veuille dire cohérence, pointant là un réel manque...
Mais non, rassurez-vous, cher Daniel, je ne verse pas dans un outrancié pessimisme ; je sors juste de la procédure budgétaire contradictoire, ou j'ai entendu (pour paraphraser à nouveau notre regretté Coluche) "dites nous ce dont vous avez besoin, on va vous expliquer comment vous en passer". Et de rajouter, mais surtout faites de la qualité.
Allez ! A très bientôt
PS : continuez surtout votre blog...
Rédigé par : Olivier GENTILLEAU | 18 février 2010 à 17:38
Pas compris comment m'abonner, merci de m'aider...
Rédigé par : patrice lasne | 25 mars 2011 à 11:46