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Une situation problématique…
Les établissements ou services d’aide par le travail (ESAT) qui permettent aux personnes handicapées de bénéficier d’une
activité spécifique, comme « travailleurs handicapés », ainsi que
d’activités de soutien et de formation, traversent aujourd’hui une phase
difficile.
Rappelons que ces établissements étaient appelés jusqu’en 2005 des
Centres d’Aide par le Travail (CAT), les premiers d’entre eux ayant été créés
dès 1935 (par l’Association LADAPT de Suzanne Fouché par exemple), même si la
reconnaissance réglementaire a été plus tardive : une première circulaire
en 1964 (parlant de conditions de travail protégé), puis par une circulaire
complète en 1978 (la circulaire dite « 60 AS » qui proposait 2
missions : des activités de production et des activités de soutien, ces
dernières étant de 2 types). Les « travailleurs handicapés » oeuvrant
dans ces établissements n’y sont pas des salariés au sens strict du terme. Pour
cette raison, les CAT ont vécu, il y a quelques années, une campagne de
dénigrement qui, prenant appui sur quelques situations particulières, n’aurait
pas dû mettre en cause, me semble-t-il, leur principe même.
Les CAT ont bénéficié de la loi de 1987 pour l’intégration
professionnelle en milieu ordinaire des personnes handicapées (la taxe des
entreprises n’atteignant pas un pourcentage de 6 % de salariés handicapés
pouvant être diminuée par les montants des marchés passés avec les entreprises
de travail protégé) et devraient bénéficier de la même manière de
l’augmentation de cette même taxe, en cas de non atteinte de ce taux.
Néanmoins, le budget de ces établissements (payé par l’État) en dehors
du budget de l’activité commerciale, est toujours serré, n’a pas subi
d’augmentation majeure depuis de nombreuses années, l’augmentation globale des
financements publics consacrée au CAT puis aux ESAT privilégiant la création de
places (toujours insuffisantes). Ces budgets serrés sont souvent une des causes
d’une sélection des « travailleurs
handicapés » admis en leur sein, sélection au profit des personnes les
plus immédiatement « productives ». Or, ces budgets vont devenir
encore plus difficiles.
… pour deux raisons majeures…
Tout d’abord, malgré les incitations publiques, les ESAT sont touchés
par la crise économique : une enquête de juin 2009 (réseau GESAT) révélait que les
structures interrogées estimaient une
baisse d’activité productive de l’ordre de 21 % en moyenne.
Ensuite, la pratique des tarifs plafonds :
les pouvoirs publics se calent, pour définir une dotation budgétaire d’un ESAT
sur un montant à ne pas dépasser, établi à partir du tarif des 10 % d’établissements au montant le plus cher, l’année précédente, plus une
augmentation de 1,6 % ne couvrant pas l’augmentation naturelle de l’évolution
en GVT, glissement vieillesse technicité incompressible dans la masse salariale.
Cette pratique va conduire les pouvoirs publics à resserrer les budgets (lire à
ce sujet un article de Lien Social du 29 octobre et la dénonciation de Gérard
Zribi qui indique que les tarifs plafonds ne tiennent pas compte du déficit
chronique des structures, entre 5 et 7 %). Pire, ce tarif plafond va se trouver
aménagé en fonction du taux de « travailleurs handicapés » présentant
certains types de handicap (notamment Infirmes moteurs cérébraux ou autistes),
mais ce sont les directeurs, non des médecins, qui établiront les statistiques
de ces taux.
On serre les boulons donc, malgré des lois
incantatoires et généreuses (notamment la loi de février 2005 sur les droits,
la participation et la citoyenneté des personnes handicapées) et les ESAT vont
avoir du mal à sortir la tête de l’eau.
… plus une situation ubuesque
Pour compléter le tableau, l’État vient seulement (le 9 octobre 2009) de
donner les instructions pour lancer la campagne budgétaire 2009 : cela
veut dire que c’est seulement en novembre ou décembre que les Directions
Départementales des Affaires Sanitaires et Sociales (DDASS) commenceront à examiner
et fixer les budgets de fonctionnement des ESAT pour 2009, certains étant fixés
au début de 2010.
Il y a toujours eu du retard dans ces campagnes budgétaires, mais
aujourd’hui le summum est atteint :
les ESAT ont déposé leur dossier de demande de dotation budgétaire pour
l’année 2010 le 31 octobre 2009, sans connaissance de leur budget 2009. Ce
dernier budget sera établi alors même que l’année risque d’être largement
terminée, les DDASS étant mobilisées dans la préparation de la mise en place
des Agences Régionales de Santé (ARS). On croit rêver, mais non, c’est la
réalité…
Pourra-t-on en revenir rapidement à une rationalité lisible, celle
dont les pouvoirs publics se réclament justement pour le financement des
politiques publiques ? Je formule le vœu que les dérives permanentes sur les
dates d’établissement des budgets soient vite effacées par la nouvelle
organisation qui sera mise en place dans les ARS. J’ai bien peur que ce vœu,
largement partagé, soit tout simplement ignoré.
Daniel GACOIN
bonjour,
effectivement la situation est étonnante et détonnante.
il manque juste un point d'interrogation : certains ESAT fonctionnent avec un coût à la place de 10 000 € et d'autres 13 000 €.
Comment explique t-on cette différence ? et quoi cette différence se traduit par une meilleure qualité d'accompagnement ?
A ces questions, il n'y a, me semble t-il, aucune réponse objectivable apportée à ce jour.
L'ANAP s'en chargera peut-être...
Rédigé par : alexandre hausknost | 09 novembre 2009 à 10:15
Bonjour,
Je prend connaissance de votre position concernant le budget des ESAT.
Je passe sur l'irrationnalité de la campagne budgétaire qui touche, comme nous le savons bien, la question du devenir effectif de ces établissements dans le champ médico-social.
Je voudrais simplement réagir à un passage de votre commentaire portant sur le besoin de places en ESAT.
Qui est aujourd'hui capable de mesurer le besoin effectif en nombre de places (peut-être réel dans certaines régions ....????)
Qui a aujourd'hui prise dans chaque département sur le nombre effectif de personnes en attentes d'une admission ?
Combien de doublons sur ces listes d'attente ?
Combien de places non pourvues aujourd'hui dans les établissements avec les retards accumulés par les MDPH ?
Combien de personnes amenées à prendre leur retraite dans les années à venir, personnes bien souvent admises lors des créations de ces établissements il y a environ 30-40 ans?
Nous aurons là un renouvellement des générations et un nombre conséquent de places à pourvoir dans les prochaines années ?
Mettons alors en balance dotations nouvelles pour la création de places et tarification plafond !!!
Cordialement
Gérard Theurelle
Directeur d'ESAT
Rédigé par : THEURELLE Gérard | 01 décembre 2009 à 10:34