Le changement dans la conception
de l’évaluation sociale et médico-sociale…
J’ai encore relu ces jours-ci les recommandations de bonnes pratiques
professionnelles publiées par l’ANESM en juillet 2009 sur la conduite des
évaluations internes dans les établissements et services sociaux et
médico-sociaux.
J’ai retrouvé le virage, définitivement engagé cette année, pour les
évaluations dans les établissements et services sociaux et
médico-sociaux : mise à distance des approches « qualiticiennes » (examen d’une conformité à des standards
ou référentiels), avancée vers une approche « évaluationniste »
avec examen des effets et des impacts, de l’efficience des interventions (voir
mes articles d’août 2009, de septembre 2009, ainsi que celui de Laurent Barbe
dans les ASH le 11 septembre 2009).
… mais des définitions qui
laissent à désirer
Néanmoins, l’idée d’interroger la pertinence et efficience des
actions, plutôt que leur conformité ou effectivité, me paraît une évolution
positive. Donc acceptons l’idée de base d’un examen critique des « effets et impacts » des
actions. Je me suis alors intéressé à la définition qui était donnée de ce
qu’on appelle un effet ou un impact… Bizarrement, la définition est nébuleuse…
Le texte de l’ANESM nous indique
ainsi qu’une intervention a des conséquences : des changements dans le
contexte de l’intervention, dans la mise en œuvre des actions, dans leurs
articulations, qui affectent les destinataires de l’intervention (les usagers)…
Les effets y sont « les changements
effectifs ou attendus pour les usagers, conséquences logiques d’un ensemble d’activités qui modifient leur situation ». Changement de situation ? Changement de
comportement ou des compétences ? Changement dans l’environnement ? Ce
n’est pas clair… Concernant les impacts, la définition est encore plus
nébuleuse, ce serait des « effets à
long terme » ou « l’analyse
de ce qui aurait pu se passer en absence de l’intervention ». Allant
un peu plus loin, j’ai évidemment retrouvé des approches, parfois contradictoires,
chez différents auteurs « évaluationnistes »,
néanmoins le flou ou la diversité sont de règle.
Une première proposition…
Aussi m’a-t-il semblé juste de faire quelques réflexions pour
qualifier, ou définir, « l’effet »
en évaluation. J’ai donc été particulièrement intéressé par la lecture du N° 5
des Cahiers de l’AVISE (Agence de valorisation des initiatives
socio-économiques) qui traite de l’évaluation de l’utilité sociale d’une
structure ou d’une activité.
J’en ai utilisé le contenu pour proposer une définition : l’effet
est « une modification repérable
(pouvant être concrètement décrite ou quantifiée), réalisée d’un temps T 0 à un temps T 1, » cette
modification pouvant se décliner…
> soit sur un plan personnel : adoption de nouvelles postures ou attitudes, progression dans les connaissances, dans les savoir-faire, dans le mieux-être, modification dans les interactions, les modes de relation ou d’expression,
> soit sur un plan institutionnel : une progression dans la participation à des évènements ou temps d’expression, des liens plus importants entre groupes ou institutions, des articulations et coopérations nouvelles,
> soit sur un plan économique : développement de l’emploi, coûts moindres pour un groupe social ou la société, création d’entreprises ou de richesses,
> soit sur un plan sociétal : progression dans la citoyenneté (prise de responsabilité dans des initiatives, droits et devoirs davantage respectés), augmentation de rencontres humaines et sociales, meilleure acceptation de la différence (soit chez les usagers, soit dans le corps social),
> soit sur un plan politique : approche ou conception politique nouvelle, examen critique d’une politique, soutien d’une évolution ou d’un ajustement,
> soit sur un plan environnemental : progression dans le respect l’environnement, avec pratiques de sauvegarde et progression d’une vision à long terme de la conséquence des actes.
Je retiens tout d’abord, pour l’évaluation des activités d’un
établissement ou d’un service social ou médico-social, la dimension
personnelle : adoption de nouvelles postures ou attitudes, progression
dans les connaissances, dans les savoir-faire, dans le mieux-être, modification
dans les interactions, les modes de relation ou d’expression.
Une deuxième proposition…
Mais il me semble que la modification, résultat éventuel d’une
prestation, serait limitée si elle n’abordait pas la question de fond posée par
« la relation de service » construite,
non uniquement sur une prestation qui transforme, mais sur une interaction qui
permet à l’usager, au bénéficiaire, d’être co-acteur de la prestation… Comment qualifier
ses effets ?
Daniel GACOIN
Bonjour et merci pour votre blog toujours aussi instructif. Je me demande comment vous faites pour tenir la production, bravo je suis admiratif.
Ceci étant la question des effets mentionnés dans la RBPP de juillet 2009 appelle pour moi la question suivante : ne s'agit-il pas finalement d'une première étape vers une démarche d'évaluation des résultats ? Le secteur étant fort récalcitrant à cette idée j'ai le sentiment que les auteurs de la RBPP s'en sont "tirés" avec cette notion effectivement molle "d'effets".
Ils auraient pu utiliser la notion d'évaluation d’impact escompté : rapport entre les évolutions, changement et les objectifs qui guident l'action / et comparer cela avec l'évaluation d'impact escompté, c'est à dire le rapport entre les enjeux de départ et la situation à l'arrivée...Je pense que ces éléments évolueront dans les années à venir. Si certains auteurs lisent cette remarque, peut-être pourront-ils donner leur point de vue ici !
Autre chose : dans la recommandation de juillet dernier il y a un élément avec lequel je suis en désaccord :
concernant les règles déontologiques du recueil des informations mentionnées page 38 de la recommandation :
"Quelles que soient les modalités du recueil des informations, des règles déontologiques sont à respecter :
le consentement libre et éclairé des répondants, l’autorisation des parents ou tuteurs éventuels, la
confidentialité des réponses individuelles et leur anonymisation dans le traitement."
Je pense qu''ils auraient du écrire que les réponses resteront anonymes mais non confidentielles", sinon comment traiter les résultats obtenus ?
Bien cordialement et bonne continuation du blog.
Rédigé par : Yves CATHELINEAU | 27 octobre 2009 à 20:52