Un petit article de Travail Social Actualités (quotidien électronique) de cette semaine m’a
semblé particulièrement intéressant. Il mentionne deux décisions très récentes du Conseil
d’État relatif à des révocations d’agents de la fonction publique :
Le premier dans un Centre Hospitalier au sein d’un service accueillant des personnes très vulnérables, atteintes de maladies neuro-dégénératives et de troubles du comportement. Un agent y donne une gifle à un résident en réponse à un comportement agressif (une morsure) de ce dernier, au moment où il lui délivrait des médicaments,
- Le deuxième dans une maison de retraite publique.
Un agent de service hospitalier donne une gifle à une personne âgée qu’il l’avait
giflé antérieurement.
Dans le cas de la maison de retraite, le Conseil d’État confirme la
révocation définitive de l’agent, estimant que la gifle est une faute, « eu égard à la nature des fonctions de
l’agent au service de personnes âgées et handicapées (…) ayant une particulière
gravité ».
Dans le cas du Centre hospitalier, le Conseil d’État confirme une
atténuation de la sanction (non plus une révocation, mais une exclusion
temporaire avec mise à l'épreuve d'un an dans un autre service) du fait de
circonstances atténuantes : « information
des supérieurs (…), tort reconnu (…), réaction spontanée à la blessure infligée
et à la douleur ressentie ».
Ceci confirme que la gifle, fût-elle une réaction à un comportement
violent, n’est pas admissible. L’Agence Nationale de l’Évaluation Sociale et
Médico-Sociale (ANESM) dans sa recommandation sur la gestion de la violence
dans les établissements pour adolescents en juillet 2008, avait confirmé comme «
bonne pratique professionnelle » qu’en cas de violence difficilement
contrôlable d’un adolescent, il convenait de pratiquer une contention, mais « sans brutalité, sans humiliation,
sans érotisation ».
Il me semble important de rappeler cette évidence avant d’examiner le
sort de tout professionnel en difficulté, et principalement de tenir à une
position inébranlable : bannir dans une relation d’accompagnement toute
violence (physique, psychologique, médicamenteuse, de privation, de captation, etc...)
du professionnel, cette dernière étant inacceptable, qui plus est en direction
de personnes vulnérables, qui plus est quand on est professionnel.
En complément, il me semble juste de ne pas condamner les personnes,
même quand les actes sont sanctionnés, de penser à la dimension collective de
tout acte individuel (ce qui dans l’institution peut favoriser cet acte…). il
me semble même utile d’entrer dans une compréhension d’une réalité
individuelle. J’ajoute néanmoins deux éléments :
- Le fait de parler d’une difficulté, ou d’une
erreur, en reconnaissant ses torts, peut atténuer « en droit » une
sanction et tout jugement : c’est un bon conseil à ceux qui pratiquent envers
et contre tout le déni, rappelé par le récent arrêt du Conseil d’État. Ainsi
toute compréhension d’une situation d’erreur me semble basée sur la
reconnaissance de cette erreur.
- Il convient de ne pas oublier ce que nous disait le
psychiatre Stanislaw Tomkiewicz (Aimer
mal, châtier bien, paru en 1991 au Seuil) : le réflexe commun de tout un chacun, témoin d’une
situation de maltraitance, consiste souvent à « minimiser les conséquences, le vécu de la victime » (ce
ne serait pas si grave, il l’a un peu cherché, etc.), et de « maximaliser les conséquences, les
risques pour l’auteur » (si on le signale, il risque de perdre son
boulot, son honneur, sa famille, etc.). Cela me semble à méditer quand on
regarde surtout la question des sanctions ou quand éventuellement on en juge le
caractère trop sévère.
Daniel GACOIN
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