Le lecteur de mes 4 derniers billets, sur ce blog, aura compris que je considère que l’ANESM, dans son dernier texte de recommandations pour la conduite de l’évaluation interne (publié le 27 juillet 2009), a pris une position fortement teintée par l’influence des « évaluationnistes » par rapport aux « qualiticiens ».
… et mes inflexions
Je pense, comme le groupe de travail qui a rédigé cette recommandation, qu’en évaluation, mesurer, puis corriger la qualité des pratiques par un regard sur les écarts entre ces pratiques et des standards (ou référentiels) établis par avance, généralisés, est une erreur. C'est même une contradiction avec la définition de l’évaluation d’une activité, d’une politique ou d’un programme : l’évaluation regarde, dans ce cadre, la pertinence des objectifs, la cohérence et l’effet-impact des actions engagées.
Néanmoins, je considère que l’évaluation sociale et médico-sociale dans les ESMS comporte également une évaluation de la qualité des prestations (article 22 de la loi du 2 janvier 2002), et notamment une évaluation de l’effectivité des droits des usagers (décret DGAS du 15 mai 2007).
C’est ce qui m’amène à émettre une position qui se veut équilibrée :
- d’une part des évaluations qui comportent un regard sur des actions au regard de processus identifiés ou d’actions « normées », mais rédigés de manière spécifique pour chaque structure à partir de ses objectifs propres (l'objectif ciblé étant un préalable à tout "process"). Je souhaite que dans cette partie, on évite le mythe de l'exhaustivité en se centrant sur un nombre limité de critères et d'indicateurs.
- d’autre part des évaluations qui comportent une appréciation, avec un regard sur la pertinence (au regard des besoins) des objectifs, sur la cohérence et les effets-impacts des actions (au regard des objectifs). Dans cette deuxième partie, je souhaite également un nombre limité de critères et d'indicateurs .
Voir plus large…
J’ai été très intéressé de recevoir la 4ème version (de juillet 2009) du groupe de travail européen mis en place sur la qualité dans les Services Sociaux d’intérêt Général (SSIG). Un petit rappel tout d’abord :
- La directive services de l’Union Européenne (du 12 décembre 2006) a établi une liberté d’établissement et d’action des entreprises de service, et la promotion de la qualité de leurs prestations. Elle a exclu les Services d’Intérêt Général (SIG), comprenant services à la personne, Services Sociaux d’Intérêt Général (SSIG), Services d’Intérêt Économique Général (SIEG) de l’application de la directive. Elle renvoie en effet pour les SIG à une directive spécifique en décembre 2009.
- La spécificité des SSIG est maintenant bien établie, mais il s’agit de la faire valoir dans des options, justifiant les financements publics, dans la directive de décembre 2009 : notamment celle de leur qualité et de son évaluation.
- Un collectif interassociatif français (le collectif SSIG, dont un des porte-parole est Laurent Ghekiere, de l’Union Sociale pour l’Habitat) est représenté à Bruxelles et œuvre, dans des groupes de travail, pour négocier les contenus de la directive spécifique SSIG. Un de ces groupes de travail est constitué par le Comité Européen de la Normalisation autour d’un projet de Cadre Commun sur la Qualité (CCQ) dans les SSIG.
… et plus juste
La 4ème mouture de ce projet de CCQ est fort intéressante, car elle pose une vision équilibrée de la question de la qualité dans les SSIG avec :
- Un nécessaire regard dans des démarches d’amélioration continue de la qualité régulière sur : la pertinence des réponses aux besoins des usagers (c’est le mot bénéficiaire qui est employé), sur les résultats (effets, avantages apportés) à ces derniers
- Un nécessaire regard sur des modalités (non uniquement des effets), dans le cadre d’une assurance qualité : et notamment le respect de critères de qualité concernant l’organisme prestataire (transparence, bonne gestion, etc.), les compétences du personnel (formation, déontologie, etc.), des caractéristiques du service, des conditions requises (cadre, coût abordable, accessibilité, clarté du cadre législatif, etc.).
En clair, l’Union Européenne, sous présidence suédoise, devrait valider en décembre 2009 une double demande pour les SSIG : une démarche d’amélioration continue de la qualité (dont regard sur pertinence et effet-impact des actions) et une démarche d’assurance qualité (des modalités contrôlées et assurées) sur quelques points clés.
… avec une approche qu'il conviendrait de prendre en compte
Il me semble donc indispensable que cette double approche inspire un peu plus l’ANESM, sauf à admettre une approche décalée, c’est-à-dire à terme recalée par la législation européenne.
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