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Dernièrement (voir mon billet du 29 avril 2009) je vous faisais part de la décision présidentielle et gouvernementale d’aller plus loin encore qu’en 2008 en matière de rémunération des stagiaires : une rémunération pour tout stage de plus de deux mois (et non plus trois comme en 2008), y compris pour les stages dans la fonction publique, avec un montant d’au moins 30 % du SMIC (380 euros).
Cette mesure, indéniablement positive, comporte un risque énorme pour le secteur social et médico-social, risque déjà éprouvé l’année dernière : les établissements et services sociaux et médico-sociaux prendront moins (voire plus du tout) de stagiaires au-delà de deux mois, au prétexte qu'ils ne peuvent verser les 380 euros de la gratification puisque la prise en compte de ces frais dans les budgets alloués par les DDASS ou les Conseils généraux est loin d’être acquise. Or les diplômes de travailleurs sociaux imposent un temps de formation comprenant la moitié du temps en stages (par exemple pour les éducateurs spécialisés, au moins 2 stages de 2 mois et 1 stage de 8 mois).
Depuis la décision de fin avril, les protestations et discussions vont bon train :
- Dans le contexte économique fortement dégradé, l'Assemblée des Départements de France (ADF) a encore récemment dénoncé l'explosion des dépenses.
- Le 19 mai 2009, le Groupement National des Instituts régionaux du travail social (le GNI) et l’Association Française des Organismes de Formation et de Recherche en Travail Social (l’AFORTS) publient un communiqué demandant à l'Etat d'assurer le financement de la mesure « pour que les établissements et services sociaux et médico-sociaux puissent accueillir l'ensemble des étudiants ».
- Le 25 mai 2009, l’Organisation nationale des éducateurs spécialisés (ONES) publie un communiqué. Il constate des « nombreuses difficultés » et « dérives » déjà rencontrées par les éducateurs spécialisés en formation depuis l’obligation de la gratification des stages d’une durée supérieure à trois mois. Il anticipe l’amplification des « effets pervers » à venir s’il n’existe pas une prise en charge par l’État de cette nouvelle disposition. L’ONES demande que les gratifications « soient versées par un organisme unique indépendant des terrains de stages et des centres de formation » (type CNASEA) et qu’un « comité de pilotage de cette mesure associant l'ONES et les autres organisations représentatives, soit mis en place ».
- La semaine dernière, des députés interpellent le gouvernement lors du vote de la disposition à l'Assemblée nationale, constatant que, malgré les promesses de Xavier Bertrand, en charge du dossier à l'époque, qui s'était engagé à trouver des solutions, rien n’avait été mis en place. Une première réaction du président de la commission des affaires sociales de l'Assemblée : « la mesure représente un coût marginal et les départements disposent à l'évidence de marges de productivité », devant « faire preuve de solidarité envers les étudiants, en réalisant des économies dans d'autres secteurs ». Une deuxième réaction de Laurent Wauquiez, secrétaire d'Etat chargé de l'emploi : « l'article 8 bis ne concerne que les employeurs de droit privé, mais, quand bien même les organismes de droit public seraient concernés, ils sont certainement à même de comprendre qu'il est parfaitement justifié qu'un jeune faisant un stage chez eux reçoive, au bout de deux mois, une rémunération de 380 €, soit 30 % du SMIC, avec exonération totale de charges », « soyons à la hauteur de l'enjeu, sans nous en tenir à la question de l'impact financier sur les collectivités locales ».
- L'ADF de son côté a alerté les parlementaires sur la nécessité de ne pas accroître les charges des collectivités locales par des décisions gouvernementales non concertées. L'ADF a chiffré le coût de la mesure pour les départements à 45 millions d'euros par an.
- Demain, des discussions vont s’engager (l’ONES, déjà citée plus haut, est invitée à y participer) à la DGAS sur cette question : espérons que les assurances seront, contrairement au début de l’année 2008, sans ambiguïté (un chiffrage effectif, un financement réel par l’État, un organisme gérant ce financement).
A suivre donc avec beaucoup d’attention…
Un petit point de précision.
J'étais effectivement reçu hier au siège de la DGAS, mais surtout dans l'objectif de faire connaissance. Ceci étant, le sujet des gratifications a bien été abordé et j'ai pu constater que notre position était connue et que la DGAS en tient compte. Ceci étant nous sommes encore dans une phase de réflexion et il n'était pas question pour moi de demander des garanties.
Je ferai prochainement un point sur l'état d'avancée de ce dossier complexe.
Rédigé par : jean marie vauchez | 11 juin 2009 à 22:45