.
La loi Hôpital Patients Santé Territoires est en cours d’examen au Sénat. Cette loi défendue par Madame Bachelot, débattue aujourd'hui après avoir été en partie détricotée par le Président de la République en tout début de semaine, suscite débats et protestations. La présentation des médias est centrée sur la question de l’hôpital et de sa gouvernance (notamment savoir si la gestion de l’hôpital associe ou non le corps médical). Les contenus concernant le secteur médico-social (handicap, personnes âgées, addictologie…) étant présentés de manière infime voire oubliés, j’en rappelle donc ici l’essentiel :
- l’arrivée des Agences Régionales de Santé et le pouvoir de son directeur général (voir mon billet du 28 octobre 2008) : les établissements et services médico-sociaux sont des opérateurs/prestataires, toute ouverture se réalisant dans un cadre unique (seule initiative de l’ARS et appel d’offres)… Finis les DDASS, les CROSMS, finies les co-constructions des schémas territoriaux, finie l’innovation venant des organismes de terrain … il s’agira de répondre aux commandes, avec une concurrence accrue.
- le nouveau cadre de l’évaluation sociale et médico-sociale (voir mon billet du 8 février 2009) : un régime aménagé dans le temps avec 2 évaluations internes et 2 évaluations externes pendant ces cycles de 15 ans.
Quels sont les amendements qui infléchissent ce schéma ? Faisons un point rapide sur ce qui est en débat avec la ministre aujourd’hui…
- Dès les travaux de l’Assemblée Nationale, il a été prévu un aménagement des procédures d'appels d'offres : garantie pour les fédérations institutionnelles ou d’usagers d'être associés aux commissions d'appel à projets, mise en place d'un possible appel à projet « blanc » permettant de préserver la capacité d'initiative du secteur.
- Par les travaux du Sénat, on trouve d’abord l'affaiblissement du pouvoir des ARS : leur nom changerait (devenant Agence Régionale de Santé et de l’Autonomie, ce qui peut satisfaire apparemment, sauf ceux qui estiment que le champ de l’autonomie est réducteur par rapport à des champs du médico-social comme l’addictologie), leur responsabilité serait affaiblie (non plus l’ensemble de la politique de santé, mais uniquement un ensemble de programmes, et cela « au nom de l’État » et en rendant compte chaque année devant une conférence régionale de santé), leur gouvernance serait élargie (léger aménagement de leur conseil de surveillance, élargissement des collèges de la conférence régionale de santé, le collège des personnalités extérieures n’étant plus désigné par le directeur général de l’Agence).
- Une autre originalité travaillée par le Sénat, la création d'un nouveau signe : « EsmsPIC » (pour « établissements sociaux et médico-sociaux privés d'intérêt collectif »), cet amendement venant d'une proposition de la FEHAP (Fédération des Établissements Hospitaliers et d’Aide à la personne Privés non lucratifs). En gros, il s’agit de valoriser une place particulière pour les structures non lucratives en mettant en avant une nouvelle catégorie juridique : dès la loi du 2 janvier 2002, aucune distinction n’était faite entre les établissements privés à but non lucratif et les structures privées commerciales alors que leurs dynamiques d'action s'inscrivent pourtant dans des logiques très différentes, la loi HPST aggravant cette non-différenciation dans le cadre d’une concurrence accrue. Pour obtenir le nouveau statut, 4 conditions : 1. Exercer des missions sociales et médico-sociales dans un cadre non lucratif et tenir une gestion désintéressée, 2. Mettre en œuvre une action inscrite dans le cadre d'un projet institutionnel validé, 3. Publier ses comptes annuels certifiés, 4. Établir, le cas échéant, des coopérations avec d'autres établissements sociaux et médico-sociaux. Pour ma part, je note que cette nouvelle appellation peut certes être importante, mais ne donnerait pas une position spécifique au moment des réponses aux appels d’offre (sauf à aller plus loin dans les amendements) : elle serait contraignante, elle n’apporterait que des satisfactions « morales ». Je note également un oubli majeur : on parle pour les « EsmsPIC » seulement des « établissements », on oublie ainsi « les établissements et les services, une omission à réparer d'urgence...
Que penser de tout cela ? Des aménagements à la marge, une logique globale qui ne se modifie pas, une suite des débats à suivre avec attention…
Commentaires